Atelier – Cinéma, 16mm avec Boris Lehman

  Ateliers (workshops) & Master Classe

Du lundi 14 novembre au jeudi 17 novembre à partir de 10h

Antre Peaux – Au laboratoire cinéma du Haïdouc

Avec Boris Lehman

Le cinéaste initie les participant·es au montage de film en 16 mm. Iels partageront un moment collectif de création cinématographique.

Boris Lehman

Tout le monde vous le dira : Boris Lehman est un cinéaste de la première personne. Il fait partie de cette famille mythique et sympathique qui compte aussi les frères ou cousins Brakhage, Mekas, Morder, De Bernardi, Noren, Hernandez, Kawanaka, Guttenplan, Hanoun, Courant ou Akerman, et qui rapproche le cinéma de la littérature intime et de l’autoportrait.
Il a tout fait pour mériter cette parenté: il a souvent été son propre scénariste, son propre opérateur, son propre monteur. Il a enquêté sur lui-même, fait de l’auto-ethnologie. Il a été l’acteur principal de beaucoup de ses films, rayonnant amant dans Couple, Regards, Positions, enquêteur gentiment narcissique dans Babel, pratiquant la mise en abyme (et l’autodérision) dans Homme portant sonfilm le plus lourd. La plupart de ses films sont des autoportraits, je dirais même, en pensant à ce film où on le voit en « homme de terre » ou à cet autre (Masque) où il se fait faire son masque mortuaire, des auto-embaumements.
Oui, mais voilà, Boris accueille aussi les autres, les fait entrer dans ses films, leur fait une place auprès, en face, à côté de lui. Il est l’auteur d’Album 1, film super 8 d’une heure où il filme ses amis et se fait filmer par eux. Et il vient de réaliser Mes Entretiens filmés où il demande à des critiques amis de parler de son cinéma. Bref, il pratique le narcissisme à plusieurs et ses auto-célébrations ont un casting d’enfer.
Après une projection de ces Entretiens filmés à la Cinémathèque française, Jean Rouch s’est dit frappé de ce que les gens y étaient « ridicules et laids ». En voyant le film, je n’avais cessé de penser le contraire: « Étonnant comme Untel et Untel sont bien, jamais ils n’ont été aussi bien ». Boris feint d’interroger ses interlocuteurs sur lui-même mais c’est pour mieux les faire parler d’eux. Son narcissisme libère le leur, les rend plus confiants et plus libres.
C’est sans doute le syndrome de Christophe Colomb ou des Soeurs Tatin: on ne fait jamais ce qu’on croit, on fait même quelquefois le contraire. Boris Lehman croit faire un cinéma en première personne mais peut-être qu’il a en réalité entrepris le meilleur cinéma en deuxième personne de ces trente dernières années.

 

Dominique Noguez